Suzane, quelques mots sur la femme derrière l’artiste
Nous sommes le samedi 15 avril, la météo est au beau fixe depuis quelques jours, bien entendu les rues sont pleines, tous et toutes profitent des quelques rayons de soleil qu’a daigné nous offrir mère nature avant la (possible) prochaine déception météorologique. Il est 17h25, mon entrevue démarre dans 5 minutes. Je l’ai travaillé et préparé avec soin, j’ai mes références, des questions si précises qu’on me croirait en chemin pour un débat politique, mon magnéto en poche, soigneusement chargé, le cerveau bien reposé, sereine, sapé comme jaja, bref tout est beau. 17H30, j’y suis, mauvaise adresse.
C’est donc transpirante, paniquée et en retard que je suis finalement arrivée au Studio TD. Bien heureusement pour moi, c’est une personne chaleureuse et souriante qui fera mon accueil, Suzane. Pour ceux qui la découvrent, voici la minute récap : Suzane est une artiste française de la scène Électro/POP, on lui doit des titres phares comme Pendant 24h (en featuring avec Grand Corps Malade) ou encore l’Insatisfait de son premier album TOÏ TOÏ.
Plus récemment, l’artiste a sorti un nouvel album CAMÉO, un projet qui regroupent des morceaux à succès tel que Clit is good, Belladonna, Génération désenchantée et d’autres. CAMÉO, en comparaison à TOÏ TOÏ, se veut un projet d’autant plus engagé, aussi bien sur le plan artistique que personnel, une œuvre à travers laquelle Suzane nous partage ses ambitions, ses souvenirs, mais aussi ses combats.
À l’écriture d’un deuxième album peuvent souvent s’opposer deux ambitions : celle d’assoir son style et de ne pas prendre le risque de décevoir sa fanbase ou bien se réinventer, dans une certaine mesure, et espérer que tous et toutes suivent le mouvement. Pour Suzane, c’est la deuxième option qui s’est imposée « […] Sur TOÏ TOÏ, je suis arrivée avec mon carré ma combi, un truc plutôt personnage, mais sur CAMÉO j’avais envie de tout casser. J’avais envie de raconter le monde, mais que les gens s’identifient aussi. »
La période de pandémie aura été propice à l’écriture, mais aussi à la réflexion pour la jeune artiste qui en a profité pour se confier un peu plus personnellement à travers son album me confie-t-elle.
« Avec un album comme CAMÉO, j’aurai pu perdre ma fan base. TOÏ TOÏ [était] un album très électro. Je parlais beaucoup des gens, j’écrivais beaucoup en Tu en Il, très peu en Je. J’avais beaucoup de mal sur le premier album. Je n’étais peut-être pas prête. Là, sur CAMÉO, j’ai senti que j’en avais besoin, peut-être un peu aussi parce que j’avais le sentiment de m’être oubliée. Peut-être que cette Suzane a pris beaucoup de place dans ma vie. Peut-être aussi parce que des gens m’ont fait penser que ce ne serait pas assez bien de raconter la fille de classe moyenne. Mais je n’avais pas envie de me déguiser, dans ce deuxième album j’enlève le déguisement. Artistiquement, j’ai de plus en plus envie d’être moi-même, c’est déjà difficile pour tout le monde dans la vie de tous les jours. Mais je veux aller au bout de mon art, des choses, continuer de raconter le monde en restant moi-même. »
Raconter le monde, mais aussi les choses simples du quotidien, comme les discussions entre amies.s qu’on retrouve dans Et toi ça va? Ou encore La vie de famille dans A la casa, que Suzane a écrit lorsqu’elle était auprès des siens. D’autres thèmes, plus difficiles, sont aussi abordés, notamment dans La fille du 4ème étage qui traite de violences conjugales, une histoire vraie qui l’a bouleversée et qu’elle me raconte, aujourd’hui encore, avec beaucoup d’amertume. Parler des femmes Suzane le faisait déjà dans son premier album (SLT – TOÏ TOÏ). Bien qu’il soit difficile de traiter de certains sujets sans être rangée dans une case et/ou se retrouver cataloguée comme « celle qui parle de… », m’explique-t-elle, continuer de le faire dans CAMÉO était une évidence. De ce désir sont aussi nés des morceaux comme Clit is good, une ode au plaisir féminin qui a d’ailleurs fait l’objet d’un clip réalisé par Charlotte Abramow (un chef d’œuvre qu’on vous invite à voir) et qui est aujourd’hui censuré en France, pour des raisons non identifiées [ndlr].
« Clit is good est arrivée dans ma tête naturellement, je l’ai écrit parce que j’aime bien mettre des mots où il y a des silences […] C’est très frustrant que [le clip] soit censuré, qu’on ne voit pas cette manière de représenter la sexualité. Sachant qu’on est très souvent dans des images dégradantes de la sexualité et là [ça se voulait] lyrique et poétique. »
Cela ne paraît peut-être pas, mais nous n’avons que très peu parlé de son dernier album. Ce qui devait être initialement une entrevue s’est transformée en une belle et longue discussion durant laquelle nous avons échangé sur nos ambitions, nos craintes, nos désirs, etc. Suzane ou j’aimerais plutôt préciser ici Océane, touche aujourd’hui du doigt tout ce à quoi elle aspirait de quoi laisser un bon pressentiment pour la suite…
« […] C’est quoi le succès? Est-ce que c’est quand les gens sont là? Mais quand ils ne le sont plus, est-ce que ça veut dire qu’il n’y en a plus? [Le succès, pour moi], c’est être allé au bout de mon art, au bout de mes gestes, sans me tordre, sans m’accommoder, rentrer dans le moule […] Tant que je continuerai à faire ça, tant que ça me fera du bien, ce sera ça mon succès. » - Océane
Cliquez sur l’image ci-dessous pour écouter l’album « Caméo » de Suzane.